dimanche 26 septembre 2010

Mexafrica 2e partie : Chercheurs d'or 1936 chapitre 11.

Chapitre 11

Chez les Von Hauerstadt, toute la maisonnée était réveillée et prenait son petit-déjeuner, thé, café, lait, jus d’orange, chocolat, beurre, confiture, pain, croissants, biscottes, céréales, fromage, jambon, œufs, viande froide, fruits variés, selon le goût ou l’appétit de chacun.
Franz mettait à profit ce temps de détente pour affiner le planning de la réception des invités. Ainsi, l’abbé Lemaître
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arrivait à onze heures en gare de Munich. Otto Möll et les Américains Isaac Asimov,
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Vincent Price
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et Luis Alvarez
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à l’aéroport international à 12h15, les autres Français, toujours par train, dans la soirée. Il s’agissait de Jean Rostand et de Gaston Bachelard.
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Enfin, Edgar Pierre Jacobs,
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le dessinateur belge était attendu à 19h30, son rapide venant directement de Bruxelles. Elisabeth était chargée de l’accueil des Américains et Thomas de celui des francophones.
La première journée serait consacrée à la prise de contact, aux discussions informelles et à la détente afin que tous se sentissent à l’aise. Les exposés prévus et les échanges de points de vue ne commenceraient que trente-six heures plus tard. Mais le steeple chase visant Franz et Daniel allaient bouleverser ce programme.
Penché sur son organigramme, le duc récapitulait donc le programme lorsqu’il reçut un nouveau coup de fil d’Otto Grass. L’aubergiste venait aux nouvelles.
- Est-ce que les trois jeunes gens dont je vous ai parlé sont arrivés?
- Pas encore. Par contre, Daniel Wu Grimaud s’est manifesté; il est là pour me protéger et… pour autre chose…
- Appartient-il aux services secrets? Et si oui, lesquels?
- Pas du tout! Je ne puis m’étendre en détails au téléphone mais, sachez mon cher Grass, que cet homme que beaucoup recherchent, est bien plus prodigieusement intéressant que tout ce que vous pourrez supposer! Il est accompagné de professionnels de la sécurité des plus capables, croyez-moi!
- Donc, vous lui faites confiance?
- Tout à fait!
- Je voulais vous dire qu’au village il y a un afflux anormal de touristes pour la saison…
- Développez…
- On se croirait au début de l’ouverture de la chasse! Et les stations de sports d’hiver sont un peu éloignées. J’ai d’abord vu un car de Chinois fort disciplinés.
Ah! Les affiliés de Sun Wu! Daniel m’a expliqué.
- Gut! Ils n’ont donc rien à voir avec Mao!
- Il aurait peut être mieux valu! Soupira Franz.
- Ensuite, cinq autres groupes sont arrivés échelonnés, à l’allure martiale. A mon avis, ils ont la même origine. On ne trompe pas un vieux briscard comme moi! Un Hollandais aux moustaches en guidon de bicyclette les commandait.
- Certainement le bras droit de Merritt. L’Anglais a recruté des mercenaires…
- Des mercenaires? Monsieur, vous m’inquiétez! Quelle bataille se prépare donc?
- Disons plutôt une course poursuite. Ne vous en faites pas mon ami et poursuivez.
- D’accord. Puis, il y a eu d’autres attroupements, plusieurs camions, un nouveau car de touristes cette fois-ci plus cosmopolites et enfin une voiture américaine rouge des plus tapageuses! L’Américain qui répond aux initiales de TQT et son ami l’Autrichien ont bien passé la nuit dans mon auberge. Or, ce matin, très tôt, ils ont reçu la visite de personnes étrangères elles-aussi, des complices, sans doute! Parmi tout ce monde, j’ai remarqué un Noir anglophone assez âgé, un Italien apprêté et mielleux aux cheveux teints, une femme blonde à lunettes, à l’air revêche, une française ce me semble à cause de son accent catastrophique…
- Ces signalements correspondent à ceux des représentants du néo libéralisme.
- Monsieur, oubliant ma bonne éducation, j’ai… un peu écouté aux portes! L’Italien a dit distinctement à l’Autrichien: « les caisses de schnaps sont arrivées à bon port. Nous pouvons passer à l’action. » Ensuite, dans la chambre, tous ont parlé anglais!
- Holà! Les choses s’accélèrent! Je vais en informer Daniel!
- Monsieur le duc, je n’ai pas terminé. J’ai regardé le registre des clients d’hier et de ce matin. J’y ai lu le nom d’un client donné par le trio d’adolescents. Adelphe Fiacre de Tournefort.
- Otto, il n’y a là rien de surprenant! Le Français est l’un de mes participants au colloque. Il a simplement un peu d’avance, c’est tout!
- Euh… je veux bien, monsieur! Mais le dénommé Geoffroy m’a assuré que ce Tournefort était mort assassiné!
Franz marqua une pause.
- Vous venez d’expliquer ce qui n’allait pas chez ces jeunes gens, Grass. Eux aussi ont voyagé dans le temps!
Otto crut avoir mal entendu car, à la suite de la tempête de neige de la soirée, il y avait de la friture sur la ligne. Il ne releva donc pas les propos de son ancien colonel qui prit ensuite aimablement congé.
Après avoir raccroché, Franz rapporta toute la conversation à Elisabeth et à son hôte.
Celui-ci se voulut rassurant.
- Pour l’instant, vous n’avez rien à redouter. Antor s’est posté en observation, secondé par Violetta et Raoul. Mon ami peut capter et filtrer toutes les pensées émises dans un rayon d’un kilomètre et ce, sans la moindre difficulté! Si nécessaire, il est capable de laisser voguer librement son esprit sur des distances beaucoup plus grandes encore et sonder tous les êtres pensants durant de longues heures! Fermat, quant à lui, vérifie nos armes et révise certaines d’entre elles. Hillerman, à bord de la navette, contrôle un périmètre plus vaste s’étendant au-delà de la Bavière.
- Oh! Dans ce cas, nous pouvons emprunter ma Mercedes pour chercher Lemaître! Elisabeth partira un peu plus tard avec Dieter et Kurt.
- Puisqu’il s’agit de votre véhicule, je vous laisse le volant.
- Vous savez donc conduire une antique automobile!
- Ainsi qu’une moto! Cependant, Irina n’aime pas me voir chevaucher pareil engin. Elle est assez protectrice sur ce point. Mais, ici, je n’ai pas amené mon véhicule des plus spéciaux. Hélas!
- Comment cela?
- Ma moto peut voler et elle se déplace à la vitesse du son!
- Vous n’êtes donc pas blessé par la pression de l’air?
- Lorsque je l’utilise, je suis protégé par une combinaison peau! De plus, je puis, lorsque les circonstances l’exigent, courir aussi vite!
Médusé, Franz se tut. Peu après, il s’installa à la place du conducteur et la Mercedes démarra.
Pendant ce temps, attablé, Uruhu déjeunait tardivement. Après sa veille, il avait dormi cinq heures.
En retrait, Elisabeth l’observait mangeant du poisson cru et du poulet froid, intriguée par cet homme antédiluvien dont l’espèce était disparue depuis trente mille ans environ. Tous ses préjugés étaient en train de tomber ainsi qu’une appréhension diffuse.
Or, notre K’Tou détestait être l’objet de la curiosité des Niek’Tous! Surtout lorsqu’il se nourrissait! Certes, depuis son adolescence il avait appris à se servir de couverts et à respecter les normes de savoir vivre en usage à bord du Langevin, mais ses gestes restaient gauches sauf lorsqu’il pilotait le Langevin et corrigeait sa trajectoire manuellement bien plus vite que l’ordinateur affecté à cette tâche!
Encouragée par la placidité apparente d’Uruhu, le Néandertalien contrôlait ses sentiments, Elisabeth osa l’interroger.
- Franz m’a dit que vous étiez un authentique homme de Neandertal. Cela me semble peu crédible.
- Pourtant, j’en suis bien un, madame! Répondit notre K’Tou de sa voix particulière. J’ai vécu mon enfance parmi les miens, une enfance des plus ordinaires! Le commandant Wu m’a sauvé et ramené avec lui alors que j’avais quatorze ans à peine.
- Et vous ne regrettez rien?
- Non! Pourquoi? Toute ma famille et mon clan ont été tués par les Niek’Tous! Les envahisseurs!
- Les… Niek’Tous?
- Dans mon langage, les non hommes! Les Sapiens noirs du Paléolithique moyen… mais depuis, j’ai appris à vivre parmi vos semblables. Je connais les sentiments qui les habitent! La curiosité et la répulsion qu’ils éprouvent face à ma « laideur » relative… Pourtant, je ne suis pas un homme singe comme beaucoup de vos contemporains le croient!
- Vous maîtrisez l’anglais…
- Sur le Langevin, nous utilisons le Basic English, en fait un mélange d’anglais, de mandarin, d’espagnol et de français! Mais le commandant m’a soumis tantôt à l’apprentissage accéléré de l’idiome dans lequel je m’exprime maintenant. Ah! Et je parle couramment neuf dialectes Haäns!
- Vous ne vous en cachez pas: vous admirez Daniel Wu!
- Plus que cela, madame! Je me ferais tuer pour lui! Vous savez, il a remplacé le chef de ma tribu, le sage, le sorcier mais aussi la matriarche! Il m’accepte tel que je suis, m’accorde sa confiance et, surtout, ne m’humilie pas!
- Tous à bord de votre vaisseau font-ils de même?
- Ils essaient! Certes, le lieutenant dinosauroïde méprise tous les humanoïdes, mais… il connaît les limites. S’il ose se montrer trop supérieur, le commandant ou Antor le remettent vite à sa place!
- Est-il vrai que vous possédez des dons de télépathie et de médiumnité?
- Pour la télépathie, j’ai un niveau 300, à peine correct, mais pour la médiumnité, j‘atteins le maximum! Forcément car les Niek’Tous non modifiés ont sacrifié une partie de leur cerveau pour développer un langage articulé complexe! En choisissant ce mode d’expression, ils se sont coupé du reste des êtres vivants.
- Expliquez-vous, fit Elisabeth avec douceur.
- Je comprends le langage des anthropoïdes, ressens les émotions des plantes et puis communiquer directement avec la Terre. Daniel Wu parle de… symbiose.
- Merveilleux! S’exclama la jeune femme en français. Nous serions donc passés à côté de certaines valeurs! Reprit-elle ensuite en anglais.
- Exactement! Y compris les bouddhistes. Or, le commandant professe cette philosophie.
- Franz s’intéresse à l’anthropologie. Il m’a dit que votre conception du monde se rapprochait de celle des Australiens et des Inuits.
- Les Australasiens, madame, sont des K’Tous Niek’Tous noirs. Ils ont conservé le physique de ceux qui sont venus exterminer les miens! Je ne les aime pas! Lorsque je le peux, je les évite! Mon instinct parle haut, je ne le cache pas. Pourtant, pour eux, l’homme appartient à la Terre et non l’inverse…
- Et?
- Et j’approuve, madame, je ne puis qu’approuver! Toutefois, ils ne peuvent aller plus loin dans la compréhension du vivant…
- Vous savez comment votre espèce a fini…
- Tristement. Cela m’est douloureux à évoquer… même encore aujourd’hui. Mais les Niek’Tous ne descendent pas des K’Tous… Alors…
- Précisez…
- Les ancêtres des Niek’Tous actuels étaient des cousins usurpateurs, issus eux aussi de Pi’Ou, le dieu sacré dressé, le premier qui eut conscience de lui-même. Et les Niek’Tous ont pris la place de mon peuple au prix d’un… fratricide! Voilà d’où le mythe de Caïn et d’Abel tire son origine, madame! Daniel Wu en a eu la preuve.
- Ah! Mais… comment?
- Il est le seul dans toute l’Alliance à avoir l’autorisation d’explorer les passés de la Terre. Quant à nos ennemis, qui sont aussi ceux de tous les Terriens, ils n’ont pas de scrupules. Ils voyagent à satiété dans les chrono lignes dans le but de bouleverser à plaisir le cours du temps!

***************

Sur la route en direction de Munich, la Mercedes filait. A cette époque, on ne parlait pas encore de limitation de vitesse. Néanmoins, Franz restait prudent d’autant plus que la chaussée glissait par endroit. La neige avait partiellement fondu et l’air s’était réchauffé. Le duc gardait frais dans sa mémoire la récente attaque des Russes.
A peine dix minutes à peine après avoir quitté la propriété, Daniel aperçut trois jeunes gens en anorak marchant d’un bon pas vers la demeure des Von Hauerstadt.
- Franz, ne s’agirait-il pas du fameux trio? Arrêtons-nous et prenons ces adolescents!
- Ils ne vont pas dans notre direction et nous allons être en surnombre!
- Certes… Cependant, je lis leurs pensées. Ils ont hâte de vous voir. Klaxonnez et stoppez.
- Dans ce cas, dit le Germano-américain.
Le duc se rangea sur le côté et fit comme Daniel lui avait demandé. Le premier contact correspondit aux désirs des deux parties. Une fois dans la berline, Ivan fournit quelques explications.
- Bien, répondit Von Hauerstadt. Vous affirmez donc être envoyés par Adelphe Fiacre de Tournefort, un Adelphe Fiacre mort assassiné en 1978 alors que, présentement, nous sommes tous en 1961! Or, Tournefort fait partie de mes invités. Comment avez-vous pu vous rendre ici et maintenant?
- C’est très simple, jeta Ivan avec aplomb. Ne soyez pas méfiants! Les Français ne disposent pas d’un translateur!
- Tiens donc! Vous savez!
- Par Tournefort! Reprit le blond adolescent. Le professeur Giroux a mis au point un système de déplacement instantané dans le temps, mais pas dans l’espace. Ce système repose sur l’électromagnétisme. Disons qu’il met en branle un raccourci temporel.
- Ah oui! Réagit alors Daniel. A ma connaissance, ces raccourcis ne pullulent pas et ils demandent une technologie spécifique pour être détectés! De plus, de tels déplacements nécessitent un catalyseur qui dépasse…
- Vous êtes bien informé, monsieur Wu, interrompit Geoffroy.
- Je l’admets.
- Il est vrai que les déplacements ne peuvent s’effectuer que sur une distance de cent années environ reconnut Ivan, à moins, bien évidemment, d’emprunter des supers raccourcis!
- Des points chauds encore plus difficiles à détecter, reprit le daryl pensif. Or, il n’en existe que neuf sur cette planète… Le plus célèbre se situe dans le parc de Versailles entre 1630 et 2420... Nous avons dû l’isoler et ensuite refermer la « porte ».
Geoffroy fronça les sourcils et prit sa tête des mauvais jours. Mais Ivan, comme s’il voulait se faire mousser, reprit:
- Les voyages dans le temps peuvent avoir lieu soit dans le passé, soit dans le futur ; mais cela dépend de l’orientation des antennes. De plus, pour être récupérés, les voyageurs sont astreints à se retrouver exactement à leur point d’arrivée. Sinon, jamais, ils ne retrouveront leur siècle d’origine! Bien sûr, s’ils passent un mois dans le temps, il faut que la même durée se soit écoulée à leur époque source…
- Quel catalyseur faisant vibrer les super cordes utilisez-vous donc? Questionna Daniel, de plus en plus intéressé.
- Euh… de simples bracelets de titane renforcé auquel on a incorporé des polymères…
- Tiens! Je ne me risquerais pas à me déplacer ainsi dans les flux temporels! Et ceci est sans doute un des bracelets? Mmm… La composition en est… fascinante!
- Comment pouvez-vous examiner ce matériau? S’étonna Ivan.
- Par ceci!
Daniel révéla ce qui pouvait passer pour une micro lampe torche.
- Ce titane a une origine extraterrestre… Intriguant…Helladienne même!
- Helladienne? Interrogea brusquement Geoffroy. Qui êtes-vous donc, monsieur? Ou qu’êtes-vous donc?
- Oh! Un voyageur du temps tout comme vous, jeunes gens! Mais j’arrive de 2517 et non de 1978!
- Mais vous vous intéressez cependant au translateur de monsieur, fit Pacal avec un soupçon de perfidie dans la voix.
- Je le reconnais volontiers! Mais pas seulement. Je pense que nous poursuivons en fait un but similaire. Je ne suis pas votre ennemi, Pacal, bien au contraire!
Soudain, l’Amérindien se détendit, sans doute à cause d’un coup de sonde mentale de Daniel, et, moins méfiant, se mit à raconter ce que le trio voulait précisément demander au duc, c’est-à-dire construire une machine à explorer le temps plus perfectionnée que le lourd attirail du professeur Giroux, et, ce, afin de récupérer un cube détenu par les Johnson en 1936, puis se rendre en Auvergne, sous saint Louis pour mettre la main sur la mandorle de gloire irradiante!
- Oh! Oh! S’exclama Franz. Pourquoi Giroux s’intéresse-t-il à ces objets?
- Oui, que représentent-ils pour votre mentor? Il n’appartient pas à la DST, n’est-ce pas? Reprit le daryl.
Ivan réfléchit quelques secondes puis déclara:
- A ma connaissance, Giroux est un indépendant; il ne travaille pas pour l’État. Toutes nos expéditions temporelles ont été tenues secrètes sauf l’avant-dernière, celle qui concernait la récupération du diamant bleu de la Tsarine Elisabeth. Le regretté monsieur de Tournefort ignorait l’intégralité de notre curriculum vitae.
- Je vois, articula Daniel lentement. Combien d’expéditions avez-vous menés avec succès?
- Une douzaine.
- Savez-vous qu’il existe plusieurs temps, pistes ou chrono lignes parallèles?
- Le professeur y a pensé et… cela nous a effleuré l’esprit… Dit Pacal.
- La mandorle de gloire irradiante se trouvait et se trouve encore au XIIIe siècle, mais un XIIIe siècle dévié du nôtre de 0, 005% environ.
- La déviation me paraît minime, fit Ivan naïvement.
- Ne le croyez surtout pas.
- Vous, monsieur Wu, pouvez-vous vous déplacer dans ces chrono lignes à volonté? Interrogea Pacal.
- A peu près, mais la manœuvre demeure extrêmement délicate. Encore à mon époque, peu d’humains s’y risquent; hormis les Haäns, les Velkriss, etc. Cependant, il ne s’agit pas d’humains.
- Je comprends, fit l’Amérindien, les yeux mi-clos. En fait, nous désirons récupérer la mandorle et le cube car il s’agit d’artefacts qui, entre des mains malintentionnées, pourraient mettre en danger le devenir de la planète. D’après ce que nous savons, ces objets sont assez connus et décrits, l’un dans La vie de saint Géraud rédigée en 1244, l’autre dans un Traité tibétain remontant au XV e siècle. Ce dernier ouvrage aurait pour auteur un certain Lobsang Rama.
- Ce nom cache un Michaël, murmura Daniel pour lui-même.
- Euh, outre le cube et la mandorle, poursuivit l’Amérindien, ne comprenant pas de qui il était question, le Traité mentionne et analyse toute une série d’éléments qui, une fois assemblés, constitueraient l’appareil final permettant la translation dans tous les temps possibles.
- Monsieur de Tournefort, rajouta Ivan, nous a dit que cet appareil paraissait synthétiser la biologie, la cybernétique, l’intertemporalité… Vous comprenez notre angoisse!
- Une fois les objets en votre possession, que comptez-vous faire? Demanda Daniel toujours les yeux rêveurs.
- Il n’y a aucun doute à avoir: le professeur Giroux les détruira! Affirma Geoffroy sur un ton qui n’admettait aucune réplique.
- Voilà un homme sage! Les gens du XX e siècle ne sont pas mûrs pour manipuler un bio translateur... Ces parties qui le composent ont abouti dans le passé à la suite d’un grave accident.
- Cela signifie que le concepteur du bio translateur n’est ni un humain ni un de vos contemporains! Constata le brun adolescent.
- Bien raisonné, jeune homme. Le chercheur qui l’a mis au point n’avait pas envisagé toutes les possibilités de son invention. A mon époque, sa construction en aurait été interdite. Je me sentirais responsable de vous laisser pareil héritage… murmura Daniel comme préoccupé.
- Ah! Vous voulez vous en accaparer, c’est ça! Siffla Geoffroy entre ses dents.
- Pour le rendre à son propriétaire légitime, après l’avoir délivré de ses geôliers.
Calmement, Ivan questionna:
- L’inventeur de ce bio translateur serait-il Lobsang Rama, à supposer, bien évidemment que celui-ci ne soit pas un humain…
- Non, pas du tout. Lobsang Rama, un Michaël, autrement dit un agent temporel des temps futurs, n’en a nul besoin.
- Un agent temporel, dites-vous… cela ressemble à la Patrouille du Temps de Poul Anderson!
- Sa fonction ressemble assez à celle de Manse, le personnage fétiche de l’écrivain, admit Daniel. Le concepteur du bio translateur est un Hellados répondant au nom de Stankin. La planète-mère du système est éloignée de notre Soleil de cent-vingt années lumière environ. Le chercheur a disparu dans le nuage d’Oort en 2192.
- Bigre! Jeta Ivan, fasciné.
- Comment le Traité décrivait-il les autres parties du bio translateur Ivan? Fit le commandant Wu, désormais plus attentif.
- Si je me souviens bien un cercle gravé ou gradué, une petite sphère, une plate-forme, un miroir ou plutôt un écran à facettes, des tuyaux réceptacles, et… c’est tout!
Geoffroy arborait sa mine la plus renfrognée.
- Tu parles beaucoup trop Ivan! Toi aussi, Pacal! Monsieur Wu, comment puis-je vous accorder ma confiance? Vous pourriez être un agent soviétique ou… chinois, d’après votre nom!
Franz tenta de calmer l’ire du jeune homme.
- Je vous donne ma parole que monsieur Wu est bien ce qu’il affirme, un voyageur de l’avenir. Lorsque vous serez chez moi, vous en aurez la preuve!
- Ah! J’attends cela avec impatience!
- En vous lançant à ma recherche, reprit le duc, vous preniez de grands risques puisque Tournefort a été assassiné. Savez-vous l’identité de son meurtrier?
- Aucune idée! Jeta Geoffroy. Vous avez bien la nationalité chinoise, monsieur Wu?
Comme on le voit, le comte d’Évreux poursuivait dans la même direction.
- Oui, certes, mais je suis également français par ma mère et…
- Ce matin, tôt, juste après la tempête de neige, nous avons été dormir dans un refuge de chasseurs. Là, nous y avons découvert un bol de riz, des baguettes et… surtout, un masque en caoutchouc représentant Spalding!
- Spalding?
- Cela signifie-t-il quelque chose pour vous?
- Il faudrait poser cette question à Violetta, ma nièce… Quoique… Spalding? Mais…
- Ah! Vous avez compris!
- Un anachronisme!
- Tout à fait!
- Hier, vers vingt-deux heures trente, ma famille et moi-même avons été pris en chasse par des hommes qui avaient revêtu des masques tirés des aventures de Tintin, renseigna Franz. J’ai cru, peut-être à tort, qu’il s’agissait des Soviétiques!
- Des Chinois sont dans le coup! Assura méchamment Geoffroy.
- J’admets effectivement que des Chinois reniflent notre piste, avoua Daniel comme s’il n’éprouvait aucun ressentiment face à l’attitude de l’adolescent, mais ils appartiennent à une triade. Celle du Dragon de Jade. J’ignore comment ils ont pu nous trouver. Les Soviétiques poursuivent manifestement une vengeance, le Dragon de Jade itou?
- Je répète que Daniel Wu n’est pas un ennemi! S’obstina Franz, tentant de convaincre définitivement le rescapé du XIIIe siècle. Les autres chasseurs à notre recherche sont Charles Merritt, un Anglais, un homme politique américain qui a fait alliance avec un Autrichien nostalgique du IIIe Reich et aussi des nazis pur jus pouvant se déplacer dans le temps!
Pacal, à cette nouvelle, frémit, puis reprit de sa voix douce:
- Monsieur Von Hauerstadt, vous avez nommé un certain Charles Merritt. Ce ne peut être une coïncidence! Ce mathématicien, inventeur de la proto informatique, a été cité également par monsieur de Tournefort! Il aurait tenté de construire l’appareil de Stankin.
- Tout à fait exact. Ce Merritt s’est allié à des extraterrestres venus du futur, de dangereux et belliqueux guerriers. Désormais, pour gagner ce scramble spécial, tous sont prêts à recourir à des armes interdites. Actuellement, Merritt est ici pour remporter la deuxième manche. Voyez-vous, il m’a affronté une première fois et a gagné! Nous devons tous nous unir contre lui car il dispose d’un soutien de taille, celui de Zoël Amsq en personne, le chercheur Haän du XXXe siècle qui réussit, jadis, mais momentanément, à modifier la chrono ligne source…
- Moi, je suis prêt à vous croire, articula Ivan lentement. Mais, où nous rendons-nous pour l’heure?
- A la gare de Munich, prendre l’abbé Lemaître, répondit Franz. Daniel, sommes-nous suivis? Détectez-vous une présence hostile à proximité?
- Rien d’inquiétant, lança le daryl après quelques secondes. Ni la télépathie ni mes senseurs ne dénoncent un danger pressant. De plus, j’avais pris soin de vérifier votre véhicule avant notre départ. Absence totale de mouchard!
- Télépathie? Fit Geoffroy en fronçant les sourcils et en s’enfonçant davantage encore dans sa bougonnerie.
- Laisse tomber! Lui conseilla Ivan. L’abbé Lemaître, si ma mémoire est bonne, est l’inventeur de la théorie du « big bang ». Tu te rappelles ce bouquin paru récemment, enfin, je veux dire à notre époque, Les trois premières minutes de l’Univers?
- De Steven Weinberg? Compléta l’Amérindien. Passionnant!
Un peu plus tard, à l’arrivée du train de l’abbé Lemaître, le contact fut vite établi. Celui-ci, chauve, âgé d’une soixantaine d’années, portant lunettes et soutane noire, Vatican II n’était pas achevé loin de là, se présenta aimablement tout en marquant son étonnement de voir tant de personnes l’accueillir sur le quai de la gare.
- Nous nous serrerons un peu, mon père, répondit le duc. Ces jeunes gens sont des invités surprise.
Dans la voiture, la conversation reprit et roula sur des sujets moins polémiques, quoique!, sur l’astrophysique et sur l’origine de l’Univers.
- Ah! Big bang, dites-vous jeune homme! Murmura le prêtre à l’adresse d’Ivan. Je n’ai jamais entendu cette expression pour ma part! Ceci dit, elle résume parfaitement mon atome primitif, qui, sous le trop plein d’énergie, a engendré une explosion phénoménale, donnant ainsi naissance à l’Univers!
Ne pouvant s’en empêcher, Daniel mit son grain de sel.
- Pourtant, au départ, l’expression Big bang comportait une connotation péjorative car forgée par les adversaires de votre théorie. Il est vrai que, pour l’instant, la preuve scientifique de la véracité de celle-ci manque encore!
Mentalement, notre daryl androïde souffla au duc qu’en 1965 Penzias et Wilson découvriraient le rayonnement fossile de l’Univers corroborant la théorie hardie de Lemaître.
- Or, on ne rendra justice à l’abbé qu’à la fin de ce siècle, termina l’incorrigible commandant.
Von Hauerstadt acquiesça d’un simple hochement de tête puis, habilement, détourna la conversation. Inutile de révéler au prêtre la provenance temporelle incongrue de ces hôtes, n’est-ce pas? Ainsi, après s’être enquis poliment des péripéties du voyage de l’abbé, le Germano-américain enchaîna sur l’organisation du colloque, l’identité des autres invités participants, les interventions prévues et le logement; Franz expliqua également que Daniel, son épouse Irina et la jeune Violetta faisaient partie d’une branche lointaine de sa famille maternelle, les Malicourt, que tous trois n’interviendraient pas dans la manifestation scientifique. Il compléta en mentant sur l’identité d’Antor, un secrétaire, de Fermat, un ami de vieille date, de Raoul, un copain de la demoiselle, de Tony Hillerman, le professeur particulier d’anglais de Cécile et ainsi de suite! Il passa sous silence l’existence d’Uruhu et de Kiku U Tu qui devaient éviter de se montrer si possible!

***************

Sur le Langevin, Marie, toute frissonnante de peur, avait rapporté d’une voix hachée ce qu’elle avait vu dans la piscine. Grarv, le lycanthropoïde, et Kinktankt, le siliçoïde, dûment protégés et armés, passèrent donc au peigne fin toute l’aire de détente. Bien vite, ils retrouvèrent les restes profanés de Girrk, le Marnousien. Le corps mutilé offrait un spectacle abominable. La tête sectionnée du porcinoïde, le groin tout sanglant, pendait, à demi détachée du reste du cadavre.
Après s’être penché sur la dépouille avec réticence, le loup se redressa vivement! Son ouïe développée avait capté des crissements lointains qui, toutefois, allaient en se rapprochant. Un groupe de guerriers Velkriss s’avançaient régulièrement claquant des mandibules et en agitant leurs élytres. Les yeux des insectoïdes, stéréoscopiques à facettes, permettaient de voir sur tous les côtés à la fois, leur conférant un avantage certain. De plus, l’ennemi paraissait déterminé. Difficile dans ce cas pour les deux gardes de parer avec succès une attaque!
Grarv et Kinktankt, obligés de reculer pas à pas, tirèrent des salves de fuseurs qui s’avérèrent d’une inefficacité totale! En désespoir de cause, le siliçoïde alla jusqu’à lancer des jets d’acide, ayant pour résultat de donner quelques secondes de répit à son compagnon d’arme. Le loup eut juste le temps d’actionner les parois en dur acier du centre omnisports, l’isolant du reste du niveau. Momentanément à l’abri, Grarv parvint à établir un champ de contention. Celui-ci serai-t-il suffisant pour arrêter les envahisseurs?
Un des insectes tenta d’approcher une des parois. Mal lui en prit. Aussitôt, il fut entouré d’éclairs bleutés et grilla tout en dégageant une fumée noire et âcre. Mais de sa chitine roussie, brûlée, surgit presque instantanément une pulpe blanchâtre dont l’aspect vous soulevait le cœur. Il s’agissait du corps interne de l’insectoïde!
De l’autre côté du champ de force, Grarv informa Kutu de la situation, réclamant le déclenchement de l’alerte pourpre priorité un. Le Troodon faisait office de chef de la sécurité par intérim en l’absence de son supérieur Kiku U Tu.
Ailleurs dans le vaisseau, la scène de la piscine se répéta bien trop souvent et presque simultanément! Les Velkriss adultes émergeaient de leurs cocons ou de leurs alvéoles dans les cuisines, dans les tubes de recyclage des déchets, dans la salle de cartographie interstellaire, dans l’holobibliothèque 4, dans l’holosimulateur numéro 5, dans les hangars du deuxième niveau, ou encore dans la salle de maintenance secondaire des ordinateurs de secours, ou bien dans une des annexes de l’ingénierie!
Comme on le voit, l’invasion se généralisait et les alarmes résonnaient partout à bord.
Après avoir envoyé un escadron de la sécurité dont peu de membres revinrent vivants, parmi les victimes il y avait deux lycanthropoïdes, un Kronkos, un éléphantoïde, tous déchiquetés et découpés par les Velkriss, constater ce qu’il en était, Kutu fit son rapport au capitaine.
Aussitôt, Sitruk, qui conservait la tête froide malgré la situation quasi désespérée, ordonna de brancher tous les champs internes de contention, au risque d’épuiser les cristaux de charpakium. Or, ces fichus insectoïdes s’étaient désormais adaptés et, désormais franchissaient sans dommages les barrières électromagnétiques dont la puissance avait pourtant été portée à 15!
Leur tactique était la suivante: ils sacrifiaient un guerrier plus faible qu’ils envoyaient en éclaireur. Celui-ci brûlait, court-circuitant les champs, permettant ainsi aux autres Velkriss de passer l’obstacle devenu inopérant, tout cela sans aucun remord!
Benjamin n’eut d’autre choix que de fermer les accès et les corridors sur tous les niveaux du vaisseau. Il ordonna d’abaisser les portes de dur acier renforcé et de bombarder les étages ainsi isolés de jets de gaz suffocants, d’acides sulfuriques ou cyanhydriques Les gaz devaient ramollir la chitine des insectes et de la faire fondre. Les essais virtuels avaient montré qu’ils pénétraient par les stigmates et les trachées des « mantes religieuses géantes ».
Assis à son poste, dans le centre névralgique du Langevin, Sitruk suivait sur son écran sphérique la progression de l’ennemi. Les senseurs lui indiquaient l’anéantissement ou pas des formes de vie alien. Naturellement, il y eut bien quelques cadavres, mais les autres insectes, découpant les gaines de protection des câbles conducteurs, c’était le point faible de tout vaisseau spatial, passèrent par les tunnels d’aération envahirent tous les niveaux, tous les lieux de vie du Langevin, l’infirmerie, les jardins, La Taverne du Maltais, les cabines de l’équipage, etc.
Bousculant les clients du bar, les insectoïdes ravagèrent à coups de pattes rageurs et d’antennes, les comptoirs sur lesquels étaient exposées les précieuses bouteilles, dévorèrent en passant quelques membres du Langevin surpris par cette invasion autant soudaine que rapide, et transformèrent en quelques minutes La Taverne du Maltais en un no man’s land digne des guerres les plus cruelles.
Kilius, le gérant des lieux, ne dut son salut que parce qu’il sauta dans un conteneur cuve à la dernière milliseconde, conteneur renfermant de la lave presque entièrement refroidie, élément nécessaire à la boisson préférée et prohibée des Kronkos, le célèbre Chtugang! Il en fut quitte pour de cruelles brûlures au deuxième degré. Par ses réflexes, il avait sauvé sa peau de trafiquant à la petite semaine!
Dans le centre de commandement, Benjamin rongeait son frein. Il allait sans doute ordonner la reddition du vaisseau lorsqu’il vit se produire ce qu’il prit pour un miracle. Soudain, tous les guerriers insectoïdes s’immobilisèrent, leurs élytres et leurs antennes se mirent à vibrer tandis que leur abdomen caparaçonné émettait des effluves fortement alcalins. Peu instruit en xéno biologie le capitaine consulta Lorenza, son épouse, pour comprendre le phénomène. Celle-ci venait de faire évacuer l’infirmerie avec un succès relatif car il y avait eu trois pertes parmi le personnel soignant.
- Tous les insectes viennent de s’arrêter comme s’ils avaient reçu un ordre collectif! Ils chantent telles des cigales!
- Ah! Je vois! Mais ce sont seulement les mâles, Benjamin! Ils entrent manifestement en phase de reproduction. Ils chantent, ils appellent les femelles tout en dégageant des phéromones caractéristiques!
- Avons-nous une chance? De combien de temps disposons-nous?
- Vingt-quatre heures tout au plus! Ne te fais aucune illusion. Le métabolisme de ces guerriers Velkriss a considérablement été accéléré. Sache toutefois qu’en phase de reproduction, ils sont malgré tout plus vulnérables. Ceci parce que leur instinct combattif est détourné vers la conquête d’une partenaire en vue de l’accouplement.
- Oh! Alors, c’est le moment d’agir sans tarder! Sergent Kutu, mobilisez toutes les forces de sécurité disponibles! Revêtez les armures Asturkruks de combat, celles dotées de l’hyper positronicité.
- A vos ordres, capitaine! Ça va saigner! Rugit le Troodon.
Mais Penta  émit alors un « Tss Tss » désapprouvant cette décision.
- Benjamin, très cher ami, je dispose d’un meilleur moyen de dissuasion que vos ridicules tactiques Formica ou Anomalocaris obsolètes! Moi aussi je brûle d’envie de combattre! Laissez-moi anéantir ces Velkriss!
- Mmm…
- Donnez-moi donc le feu vert, vous ne le regretterez pas!
- Pourquoi cette ardeur guerrière soudaine?
- Parce que je suis resté un grand enfant, comme tous mes congénères…
- Soit! Toutefois, prenez soin de vous et ne vous exposez pas. Vos pouvoirs sont plus qu’amoindris.
- Sans doute, je ne pourrais affronter avec succès le commandant Daniel Wu… or, vos Velkriss ne disposent pas de la transdimensionnalité contrairement aux Alphaego de la chrono ligne parallèle la plus proche! Conservez donc vos gardes pour plus tard, lorsque cela vaudra réellement la peine! Si j’échoue, ils mèneront l’attaque stoppée maintenant.
- Entendu! Buena suerte, amigo!
- Hasta luego!

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Dans un cabinet privé de l’Aubépine fleurie, Thomas Quincy Taylor avait rassemblé ses principaux séides afin de peaufiner les derniers détails de son plan. Ah! Dommage que la fibre commerciale d’Otto Grass lui fasse accepter pareils clients! Durant son speech, le gouverneur du Nouveau-Mexique tentait de ne point trop bégayer. Cependant, au fur et à mesure qu’il avançait dans son exposé, sa diction s’améliorait. Tobias Nobengula, Hinckel, Noémie Pitois, Hikaru Tagawashi, Olympio Peperoni l’écoutaient religieusement, persuadés obtenir une prompte victoire. Leur leader n’avait-il pas permis ce fabuleux préambule? Se retrouver en février 1961 en Bavière?
Trois autres personnalités politiques s’étaient jointes au groupe. Celui qui devait commander le corps expéditionnaire composé d’agents de la NSA et de soldats aguerris, le général israélien extrémiste Yoel Navon, qui siégeait à la Knesset, avait fait venir ses propres commensaux, David ben Choueb, le politicien calculateur de triste mémoire, tué déjà deux fois par Fermat et le capitaine Wu dans d’autres chrono lignes, mais les mauvaises herbes étaient tenaces, et le chef religieux fondamentaliste, jeune loup à la fois de la théologie et de la politique, Nathan Aaron Guzman.
TQT qui voyait loin car éclairé par les Pi, avait su également se rallier, luxe suprême, un ancien homme d’Etat musulman, pro soviétique dans le passé, un certain Abderrahmane Mourad, général de division, spécialisé particulièrement dans l’action terroriste et la guérilla.
L’Américain rappelait de sa voix nasillarde que le duc Von Hauerstadt et Daniel Wu devaient être neutralisés lors du colloque, et ce, par une attaque perpétrée par un commando suicide. Celui-ci se servirait de véhicules bourrés d’explosifs divers. Grâce aux Pi, il possédait le plan de la propriété et de ses principaux accès. De plus, il savait où toute l’assemblée se tiendrait à l’heure H.
Les hommes de main de Mourad avaient mis au point le système de minuterie électronique. Sans scrupule d’anachronisme technologique, TQT avait apporté plusieurs ordinateurs portables alimentés par batteries, ainsi que des téléphones cellulaires facilitant les communications entre tous les membres du complot ultralibéral. Comme on s’en doute, des techniciens avaient élevé à la va-vite des relais pour ces liaisons téléphoniques spéciales et détourné un satellite soviétique reconverti pou cette tâche. Comme l’engin antédiluvien n’avait pas suffi, Pi Epsilon et Hepta avaient transféré de 1999 à 1961 un autre satellite, mais américain cette fois, plus performant. La mystérieuse disparition de l’appareil avait été mise sur le compte d’une éruption solaire. Le Pentagone pouvait mentir effrontément à son président démocrate. Par contre, en 1961, les Américains et les Soviétiques avaient capté avec la plus grande surprise ce nouveau signal… Ils accusèrent la Chine ou la Grande-Bretagne d’en être à l’origine, selon leur couleur politique.
Après la réunion, Yoel Navon tint un rapide conciliabule ne concernant que les Israéliens.
- C’est pour la forme que nous avons fait alliance avec ce TQT, rappela-t-il tout d’abord à ses compatriotes.
- Oh! J’avais parfaitement compris! Répliqua ben Choueb en allumant une cigarette.
- Nous poursuivons un autre but, bien plus proche des intérêts, irais-je jusqu’à dire de la destinée de notre peuple. Ces entités, après l’élimination des cibles désignées, veulent que nous récupérions une intelligence artificielle sous la forme d’un cube, et ce, en 1936. Or, celle-ci, une fois dupliquée, permettra à nos propres translateurs de se mouvoir sans contraintes dans les multiples chrono lignes alternatives!
Guzman objecta:
- Les  doivent cependant savoir que nous avons construit notre propre flotte temporelle et que nous suivons un tout autre objectif que ce stupide Yankee!
- A mon avis, ces êtres s’amusent à nous voir ainsi nous agiter! Lança Navon. Ils sont un peu comme des entomologistes qui nous observent fascinés. Ils pratiquent sur nous, vils insectes, des expériences. Dans tout cela, il n’y a aucune morale!
- Il ne manquerait plus que cela! Fit observer ben Choueb.
- Laisse-moi poursuivre. Plus les adversaires s’affrontent en des combats compliqués, mieux c’est!
- Oui! Si TQT a pour but le triomphe du pan capitalisme dans toutes les histoires alternatives, nous nous recherchons l’avènement du Grand messie, le Lion d’Israël, tant attendu, et ce, dans un monde vierge de tout Palestinien! Siffla David.
- Maintenant, avec les translateurs, ce rêve est à notre portée, remarqua Guzman.
- Mes amis, reprit ben Choueb, s’exaltant de plus en plus, imaginez un cours de l’histoire où les victimes de la Shoah seraient ces poux de Palestiniens! Un Hitler israélien dont le IIIe Reich serait établi en Palestine et dont les camps d’extermination, érigés dans tout le Proche-Orient, éradiqueraient les sectateurs du faux prophète impur Mahomet!
Ami lecteur, ne sois pas choqué! Nous grossissons le trait volontairement…
- Ah! Quelle grandiose perspective! S’écria Navon.
- Il va falloir tenir nos translateurs sous bonne garde et dérober ceux de nos alliés provisoires afin de pérenniser ce monde alternatif à notre convenance, jeta Guzman pragmatique. Sans compter tous les adversaires potentiels qu’il nous faudra également supprimer!
- Cette tâche ne me fait pas peur! Nous en avons vu d’autres! Reprit Yoel. En allant plus loin encore dans le passé, nous armerons le bras de Josué lui-même afin qu’il détruise à la source tous les peuples étrangers à la Vraie Religion et, ce, dès la plus haute Antiquité!
- Bravo! Cette piste est à envisager sérieusement, réfléchit Guzman. Mais, elle nous imposera de mettre au point une sorte de corps du Temps, composé de membres triés sur le volet, embrigadés, fanatisés, et fidèles jusqu’à la mort!
- Cela me rappelle quelque chose…
- En attendant, murmura David, Mourad doit être abattu dès que possible!
- Rassurez-vous tous les deux, j’ai prévu le coup, déclara froidement Navon. Il ne finira pas la mission! Vous vous doutez bien que ce salopard a rejoint TQT pour suivre ses propres objectifs! Le triomphe de l’Islam universel sur toutes les pistes temporelles! Notre propre commando s’occupera de lui sous peu. Ce sera une tragique méprise!
Ces trois comploteurs étaient tout à fait odieux, n’est-ce pas? Mourad les valait largement. Mais ce n’est pas le moment d’établir un palmarès des affreux!

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Dans le grenier du chalet, tous les adolescents s’installaient pour passer une nuit confortable. Violetta exigeait le coin le plus isolé et le plus chaud à la fois, prétextant qu’elle était une pauvre petite créature fragile, peu habituée à dormir à la dure!
- Messieurs, faisait-elle de sa voix pointue, je fais un véritable sacrifice en abandonnant ma chambre aux invités de Franz! Dire que si oncle Daniel n’avait pas promis juré d’assurer la sécurité de ces lieux, à cette minute, je serais en train de m’étirer voluptueusement dans un lit douillet et non à m’étendre sur un plancher!
- N’en rajoutes-tu pas une louche, là? Interrogea Ivan. Tu disposes d’un sac de couchage dernier cri, avec des plumes d’oie comme isolant thermique!
Raoul avait percé à jour la comédie de Violetta. Il pouffait de rire et ne s’en cachait pas.
- Cette donzelle m’agace! Finit par s’écrier Geoffroy. Pour qui se prend-elle? Pour la fille du roi?
- Du calme, mon vieux, fit paisiblement Pacal.
- Geoffroy, je partage ta colère, approuva le blond adolescent. Cette miniature de Scarlett O’hara mérite une bonne leçon. Qu’en dis-tu toi, Raoul?
- Je n’ai pas d’avis là-dessus, les gars. Cependant, mon éducation me pousserait plutôt à porter secours aux demoiselles en détresse.
- Ah! Mais c’est vrai que tu es de la haute, toi! Le toisa Geoffroy.
- Certes, mon père reçut le titre de vicomte en héritage, mais…
- Ta famille a donc été anoblie…Par qui?
- Euh… tu me prends au dépourvu, là! François Premier, je pense…
- Pff! Alors, tu n’es qu’un croquant pour moi!
- Geoffroy, tu as été piqué par une mouche ou quoi? S’alarma Ivan.
- Tu vois bien que Raoul ne recherche pas l’affrontement, renchérit Pacal.
- Je n’aime pas sa façon de regarder par en-dessous, c’est tout!
- Tu as quelque chose à cacher? Rétorqua Raoul d’une voix doucereuse. Tu penses que je vous espionne pour cafarder ensuite à Daniel Wu?
- Exactement!
- Tu te trompes! Et si tu veux que nous réglions tout de suite ce problème à la loyale, je suis d’accord!
- Mais à mains nues, sans tricherie…
- Bien sûr! A ton service, mon vieux!
Les deux garçons vidèrent leurs poches puis le combat commença. Geoffroy attaqua le premier, utilisant toute sa science du judo. Mais voilà, Raoul était un expert de la savate, art appris avec son père. Plus léger et plus mobile que Geoffroy, il sautillait, envoyait des coups de poings et surtout des coups de pieds imprévisibles à une vitesse phénoménale, tournoyant, virevoltant. Bref, il était intouchable! Ses détentes soudaines et inattendues déstabilisaient son adversaire qui n’avait jamais vu quelqu’un se battre ainsi! Crochet du droit, retour fulgurant du pied gauche, et ainsi de suite. Après moins de deux minutes, Geoffroy se retrouva sur le plancher, se frottant vigoureusement son menton douloureux, quelque peu sonné.
- Satisfait ou je continue? Jeta Raoul pas même essoufflé.
- Oh! Ça me suffit largement! Il faudra que tu m’enseignes un ou deux trucs. Je voulais te tester, c’est tout. Tu es redoutable, tu cognes dur et tu es plus costaud qu’il n’y paraît. Je ne connaissais pas du tout cette façon de se battre.
- La boxe française, mon vieux. A ton service!
- Et moi, rappela Violetta? On m’épargne parce que je suis une fille? Tout à l’heure, vous deux, vous vouliez me rabattre mon caquet et en découdre! J’attends!
- Décidément, ici, tout le monde recherche la bagarre! Fit Pacal en haussant les épaules.
- Alors? On se dégonfle? Reprit l’adolescente. Ah! Parlez-moi des garçons du XX e siècle!
- Bon! Je me dévoue! Marmonna Ivan.
- Et tu ne m’épargnes pas, d’accord? Je ne suis pas en sucre!
- Mmm…
L’Amérindien se racla la gorge.
- A vaincre sans péril, on triomphe sans gloire! Jeta-t-il ironiquement.
Plus pour s’amuser que pour autre chose, et peut-être par curiosité, Ivan s’avança et tenta une prise de judo. Il se retrouva promptement lui aussi les quatre fers en l’air en train de se frotter les reins. Il n’avait rien vu venir!
- Bigre! Tu as de sacrés muscles! Pacal t’a bien jaugée. Si toutes les filles de ton siècle se défendent comme toi, nous, les garçons, n’avons plus qu’à nous rhabiller! Tu es ceinture noire de judo ou quoi?
- Ah! Ah! Tu avoues que je te déconcerte. Tu crois que je pratique le judo! C’est un art de combat pour les bébés, ça! Je devrais plutôt t’enseigner les techniques des Kronkos. A ces joutes, j’affronte déjà des Troodons de quatre ans et sans bobo!
- Troodons? Ces demi-crocodiles vindicatifs? Interrogea Geoffroy.
- Oui, nos meilleurs gardes de la sécurité! Un Kronkos de cet âge atteint 1,80m de long jusqu’au bout de sa queue balancier et pèse 350 kg environ.
- C’est pas mal, je l’admets, reconnut Ivan.
Depuis quelques secondes, Pacal se taisait, les yeux mi-clos, tout en observant Violetta. Raoul, lui, lança innocemment:
- Tu n’aurais pas un peu triché? Oh! Juste un brin, ma chère!
- Raoul dit vrai, renchérit l’Amérindien sortant de son mutisme. Tu as été rapide et brillante, certes, mais ton allonge ne correspondait pas à une allonge normale!
- Bravo! Tu as remarqué ça, toi! J’ai été obligée de le faire! Ivan me rend vingt kilos et près de vingt-deux centimètres! Avec quelqu’un de mon poids et de ma taille, je n’aurais pas modifié la longueur de mon bras, je vous l’assure!
Ivan réfléchit.
- Je te croyais humaine, mais ce n’est visiblement pas le cas! Apparemment, tu appartiens à l’espèce des change-formes.
- Peut-être ta véritable apparence est celle des Glotz, ces extraterrestres en forme de boule de fourrure, munis de deux longues pattes, venus de Titan, que nous avons rencontrés dans les Pyrénées l’été dernier, euh… je veux dire en juillet 1977...marmonna Geoffroy gêné.
Violetta répliqua avec aplomb, son regard défiant Raoul.
- Les garçons, je suis presque aussi humaine que vous! Je n’ai qu’un quart de sang métamorphe!
- Peux-tu faire comme les danseurs visages de Dune?
- Ah! Tu veux dire prendre n’importe quelle forme, y compris celle d’un objet? Oui, mais pas longtemps! Je peux me transformer en tableau de peinture figurative, en tigresse, en méduse, en gorille femelle, en poulpe… Ma véritable couleur est celle de l’argent, mais, dans la vie courante, je préfère passer inaperçue!
- Tu ne nous caches plus rien? Fit Geoffroy sceptique.
- Non! Je vous le jure!
- Bon! Allons pioncer, les gars! Conseilla Ivan. Demain, une dure journée nous attend.
- Comment ça? Demanda Raoul.
- Nous allons devoir roucouler, faire les mondains et ne rien piger à tous les discours que nous allons avaler!
- A moins que Violetta se charge des explications? Ricana Geoffroy.
- Euh… la physique avancée, ce n’est pas mon truc! Je n’y brille pas particulièrement! La paléontologie par contre, la biologie, le droit, l’histoire, la géostratégie, les langues, ça va!
- Mmm… On verra!
Plus ou moins réconciliés, les adolescents se glissèrent dans leurs sacs de couchage. Un lourd sommeil s’empara bientôt de Pacal. Au bout de deux heures, il connut la phase paradoxale.
Alors, il vit, en caméra subjective, une cité maya ruinée, au cœur de la forêt du Yucatan. Il se dirigea vers elle, progressant lentement, comme flottant à trente centimètres du sol. Les pierres des antiques monuments ébranlés par les lianes étaient rongées par des mousses envahissantes et les malsaines moisissures verdâtres. C’était comme une lèpre insidieuse qui, partout, s’insinuait.
Au milieu de ce monde oublié, des animaux furtifs couraient. Sur une rampe, autrefois splendide, l’oiseau Quetzal sautillait avant de déployer ses vastes ailes et de s’envoler dans la nuit sans étoiles. Les bruits étranges qui formaient un fond sonore discret, n’avaient rien de surprenant. Des ululements, des criaillements, des frôlements, des coassements dans une moiteur lourde et insane.
Tapi dans l’ombre des fourrés, le seigneur jaguar guettait l’humain importun de ses yeux qui phosphoraient dans la nuit sombre. Plus haut, perché sur le rebord d’une esplanade, le seigneur aigle attendait lui aussi son heure. L’intrus était manifestement un mets de choix.
Mais Pacal n’avait cure de ces menaces. Conduit par son instinct, il poursuivait sa progression avec régularité. Ainsi, il parvint jusqu’à la pyramide temple intact, sans avoir subi la moindre agression. Etait-il protégé par les dieux?
Les statues et les glyphes mystérieux ornant le monument semblaient planer dans l’air comme l’intrus. Au ralenti, l’adolescent pénétra au cœur du temple, ses yeux défiant les ténèbres. Une large vasque emplie d’une eau bizarre occupait un emplacement stratégique. Le liquide bleuté, fumant, miroitait, reflétait d’étranges et abominables choses.
Attiré par une insatiable curiosité, se penchant, l’Amérindien reconnut avec effroi le corps de son ami Geoffroy, plongé en animation suspendue, encore vêtu de sa cotte de mailles, d’une robe armoriée aux armes des comtes d’Evreux, des éperons aux pieds, les cheveux bruns mi-longs, les yeux clos, figé dans un sommeil éternel.
Pacal ne comprit pas ce qu’il vit et recula prêt à paniquer.
Cependant, tandis que les ténèbres se faisaient moins intenses, un masque de jade de style aztèque, aux yeux de lapis-lazuli et de quartz noir, se mit à parler d’une voix claire:
- Pacal, voilà le sort qui attendait ton ami si toi et ton frère n’étaient pas intervenus et s’il n’y avait pas eu ce providentiel orage!
Ayant dit cela, le porteur du masque révéla ses traits. Il s’agissait d’Yves Despalions, le père d’Ivan, mais un Yves plus jeune que celui que l’Amérindien connaissait. Logiquement, en cette année 1961, il avait dix-sept ans de moins!
- Le masque de jade que j’arborais tantôt est à la semblance de ton homonyme de Palenque. Mais tu sais déjà cela! Apprends que j’ai retrouvé tes parents biologiques. Vois!
Deux Mexicains de type Maya émergèrent alors de derrière les piliers, entourés de la même aura bleutée surnaturelle. La femme, petite et potelée, portait une jupe fleurie où les rouges et les jaunes dominaient ainsi qu’un caraco blanc. Ses cheveux noirs comme du jais étaient protégés par un léger voile. Son visage, marqué par la lassitude, n’affichait aucune expression. L’homme, âgé d’une trentaine d’années comme sa compagne, avait, lui, les joues creuses et mal rasées. Il se prénommait Arturo et son épouse Paquita. Cette dernière s’exprima d’une voix mélodieuse, comme une caresse de miel.
- Pacal, mon fils, mon chéri, tu as une mission à accomplir en ce bas-monde! Il te faut retrouver le Cercle aux Glyphes de Texcoco! Ce cercle ouvre les portes des mondes et des êtres, il donne accès à tous les ailleurs possibles. Ensuite, tu dois veiller à ce qu’il ne tombe pas entre des mains perfides. Sache aussi que le cercle te dotera du pouvoir terrible de rétablir la grandeur de notre peuple. Tu pourras faire en sorte qu’on lui rende justice. Mais tu seras capable aussi de le projeter définitivement dans le néant. Si tu en as la volonté et le courage, tu choisiras la voie d’une histoire où nous serons ensemble réunis au sein de la splendeur de nos cités au faîte de leur gloire… Le choix difficile t’appartient. Mais prends garde à l’Anglais fourbe, à l’Asiate menteur et à l’Empereur prêtre à la peau noire et au cœur cruel! Tous les trois sont les ennemis de la Cinquième Humanité, celle du Popol Vuh! L’homme aux yeux de cristal, au sourire chaleureux, à la sagesse infinie te sera un précieux allié. Il devra affronter ses démons et son passé, mais il vaincra et, ensuite, te laissera libre de décider: ton peuple, ta race, ta famille, ou tes amis, ce monde tel que tu le connais… Mon oiseau, le choix est ton lot, ton fardeau, ta récompense… n’oublie pas mes paroles, ne nous oublie pas!
Cependant, les dernières fumées du songe s’estompèrent. Mais s’agissait-il bien d’un songe? Reprenant conscience, Pacal s’aperçut que des larmes coulaient sur ses joues. Il eut honte de cette faiblesse et s’enfouit davantage dans son sac de couchage.

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