samedi 15 décembre 2018

Un goût d'éternité 3e partie : Johanna : 1934 (2).


Nuremberg. 5 Septembre 1934. Parteitag. 
 Description de l'image Bundesarchiv Bild 183-2004-0312-503, Nürnberg, Reichsparteitag, Marsch der Wehrmacht.jpg.
Disséminé parmi la foule en civil, se trouvait le commando israélien. Tous ses membres étaient abondamment pourvus en armes dernier cri, fusils d’assaut démontables, UZI, Kalachnikovs, pistolets capables de tirer plus de vingt-quatre coups sans être rechargés, chargeurs en veux-tu en voilà, capsules de gaz explosifs, pas plus grandes que de confettis, Täsers, mines portatives, armes de poing laser et ainsi de suite.
Quelques-uns des Israéliens avaient pu assister aux obsèques de Madame van der Zelden et s’en étaient réjouis. Mais, désormais, l’heure n’était plus à ce genre de satisfaction.
Dans cette manifestation grandiose, digne d’un cérémonial wagnérien, les rois de cette fête païenne en étaient les SS. Parmi eux, se pavanant et faisant la roue, se tenait Gustav Zimmermann, le cœur gonflé à bloc à l’idée de défiler devant son Führer, Adolf Hitler. Pour lui, sonnaient enfin les trompettes du triomphe qui lui était dû pour tous les sacrifices endurés au nom du Parti, pour toutes ces heures passées à tabasser du rouge, du rose et du Juif, pour toutes ces nuits à coller des affiches…
Mais voici l’instant solennel entre tous, le mirifique moment où le chef vénéré, l’idole barbare, le guide de l’Allemagne, Adolf, prenait la parole devant une foule hors d’elle, exaltée jusqu’à la folie. Le climax de la messe barbare était arrivé. Or, surprise, le loup s’était transmuté en agneau… 
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- Le monde ne peut pas vivre de guerres. De même les peuples ne peuvent pas vivre de révolutions. Les révolutions ont toujours été rares en Allemagne. Le XIXe siècle, cet âge des Nerfs, s’achève avec nous. Pendant le millénaire qui s’ouvre aujourd’hui, il n’y aura plus d’autre révolution en Allemagne…
Ces phrases étaient-elles sincères, authentiques, vraies ? Ou bien ne s’agissait-il que d’une posture, d’une imposture ? Hitler était un habile manipulateur. Il habillait ses discours selon les besoins du moment, trompant ceux qui l’écoutaient et buvaient ses paroles comme si elles avaient été prononcées par un Dieu omnipotent, omniscient, un Dieu dont il ne fallait surtout pas remettre en cause la légitimité et la divinité, sous peine d’excommunication, d’anathème et de mise à mort.
En délire, l’assistance applaudit à tout rompre ces phrases. Les avait-elle comprises d’ailleurs ? Peu importait. La mise en scène, la gestuelle, tout participait à l’abolition de la pensée, réduisant les participants à n’être qu’un corps unique dépourvu de volonté et de tête. Seul le Führer était doté de l’intelligence. Seul le Führer prenait les décisions… 
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Le commando israélien ne participait pas à cette folie collective, à cette communion païenne, à cette mise en berne de l’esprit et de la pensée. Lui n’était pas qu’émotions primales. Sur un signe de leur chef, tous bouillant de rage rentrée, ils passèrent à l’attaque au moment jugé le plus propice pour cela. Ces jeunes gens et femmes savaient en toute conscience qu’ils allaient à la mort, un suicide qui ne manquait pas de panache.
Protégés par des armes défensives et plus ou moins passives, lentilles filtrant les rayons du soleil, masques peau filtrant les gaz létaux, les véritables héros de ce XXe siècle finissant se murent et se positionnèrent aux endroits stratégiques, ceux destinés à faire le plus de dégâts.
Alors que les Allemands entamaient à pleins poumons le tristement fameux chant de ralliement, le Horst Wesel Lied, les Israéliens progressaient peu à peu vers le point focal assigné, avec, à terme, la cible, la tribune sur laquelle se tenait et s’exprimait Adolf Hitler.
Négligence du service d’ordre nullement préparé à ce qui devait suivre ou heureux hasard ? voici les douze membres du commando à une cinquantaine de mètres à peine du chef nazi. Là, celui qui commandait, fit un signe. Aussitôt, une simple boule puante – du moins apparemment – atteignit l’estrade démesurée et roula sur la tribune. En fait, l’innocente bille était une mini bombe incendiaire qui, au bout de cinq secondes, explosa sur les gardes SS se tenant juste derrière le Führer vénéré. Le tir avait été trop long ! 
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Alors qu’une trentaine d’entre eux s’embrasait dans cet incendie brusquement allumé par un tour de sorcellerie, la panique se déclencha parmi les hauts dignitaires nazis. Comme une vague tempétueuse, elle allait gagner le reste de l’assistance.
Tandis qu’un major hurlait Teufel, et qu’un jeune homme de vingt-deux ans se jetait à bas de la tribune afin d’échapper aux flammes rugissantes, écrasant par la même occasion deux soldats, le commando israélien commençait à tirer en rafales en direction des hauts officiers SS. Le jeune homme n’eut que le temps de crier Donnerwetter avant de se taire, les poumons et la gorge brûlés.
La panique poussa les participants, les anonymes à refluer, en mouvements furieux, vers les différentes sorties du stade, tel le ressac d’un océan incontrôlé, les gens se piétinant, s’écrasant, s’agglutinant, hurlant, ivres de terreur, sans égard pour les femmes, les enfants et les plus faibles. C’était un sauve qui peut général. Déjà, on ne comptabilisait plus les victimes, nettement plus nombreuses que celles tombées sous les balles du commando. Déjà, les rigoles ferreuses s’en venaient s’écouler dans les allées bétonnées, sur l’arène, dans les rues alentour, telles des rivières de lave en fusion, entraînant avec elles des hommes et des femmes glissant, chutant dans ce pandémonium, des humains qui ne ressemblaient plus à rien, hormis à de hideuses gargouilles toutes maculées de raisiné pourpre, des monstres aux yeux exorbités, aux lèvres arborant des grimaces diaboliques, aux cheveux en bataille, aux mains devenues serres, aux doigts esquintés, aux vêtements imbibés de lymphe et de sang.
Les soldats, impuissants face à cette foule au-delà de la panique, avaient du mal à manœuvrer jusqu’aux tueurs kamikazes. 
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Cependant, Hitler n’avait pas été atteint par la bombe. Bon sang, qui le protégeait donc ? Quelle Entité mauvaise ? Désormais entouré par sa garde d’élite, le Führer était à l’abri des assassins. Derrière son rempart inexpugnable, le chef suprême de l’Allemagne fut poussé vers l’extérieur.
Isaac, le commandant du groupe israélien, avait immédiatement compris que le coup était manqué. Toutefois, il allait se battre lui et les siens, afin d’abattre le plus possible de cette engeance démoniaque, de ces monstres qui, jamais, n’auraient dû voir le jour. Peut-être, s’il y avait assez de morts, de dégâts, le cours de l’Histoire s’en retrouverait-il tout de même modifié ? C’était là son espérance secrète. 
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Alors, les soldats du futur firent exploser leurs capsules miniatures, celles qui renfermaient un gaz mortel. Des centaines de pastilles éclatèrent, répandant dans l’atmosphère leurs effluves délétères. Malheur à celui qui en respirait une bouffée seulement. Aussitôt, il tombait, asphyxié, ses poumons désormais incapables d’absorber la moindre parcelle d’air.
A l’abri des nuages fatals grâce à leurs masques, les Israéliens commencèrent à reculer parmi les grappes humaines décérébrées, livrées à elles-mêmes, tout en tirant des rafales régulières afin de disperser les gêneurs mais surtout tout ce qui portait un uniforme, de préférence de SS.
Sous la mitraille, les membres de la mort noire s’entassaient telle une récolte macabre jamais achevée.
A quelques pas du commando suicide, un lieutenant-colonel, faisant fi des règles de sécurité, ordonna de faire feu aveuglément en direction des tueurs. Tant pis pour les civils désarmés qui étaient dans la ligne de tir. Tant pis pour les innocents. Mais ici, qui était innocent ? Qui méritait d’être épargné ?
L’enfer se déchaîna. Ce qui avait précédé n’était qu’une sauterie, un divertissement puéril par rapport ce qui suivit. Des centaines et des centaines de balles jaillirent, fusèrent dans toutes les directions, blessant, lacérant, déchiquetant des soldats de la Reichswehr,
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 des jeunes gens, des vieux, des femmes, des mômes, des bourgeois, des ouvriers, des notabilités, des professeurs, des commerçants, de paisibles paysans, fauchant dans une égalité parfaite le riche et le pauvre, celui qui aurait dû vivre encore des décennies aussi bien que celui qui flirtait déjà avec la mort.
Les Israéliens avaient pu trouver un refuge précaire, certes, mais abri malgré tout, derrière une balustrade. Avec leurs armes futuristes, ils tinrent tête avec succès aux SS fous de colère, et aux dignitaires nazis qui, enfin, s’étaient ressaisis et s’étaient emparés de fusils et de pistolets qui avaient été abandonnés à terre par les innombrables défunts.
Le continuum espace-temps était en train d’être chamboulé… oui… il frémissait, tremblait, s’invaginait, se retournait… tout était en train de changer…
Mais… ailleurs, tout à fait ailleurs, l’alerte rouge résonnait déjà…
Tandis que le point nodal de tous les possibles aboutissait désormais à Nuremberg,
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 que la date fatidique de ce 5 Septembre 1934 claquait telle un coup de cymbale retentissant par-delà la Réalité, les munitions des combattants s’épuisaient. Les chargeurs vides des mitraillettes avaient été jetés avec colère par les Tempsnautes. Il leur fallait maintenant recourir aux pistolets laser, aux Täsers qui, de leurs rayons puissants s’en venaient foudroyer des SS toujours plus nombreux.
Le commando parvint à éviter le cercle noir maie en partie. Désormais assez proche du dictateur, ce dernier n’ayant pas encore quitté le stade, il escomptait bien l’abattre tel un animal nuisible. Cet objectif restait dans le domaine du possible puisque Adolf ne disposait plus que de quinze boucliers vivants tout au plus. Quant aux Israéliens, tous sains et saufs, une haine exacerbée les poussait à réussir un tel exploit.
La première, la femme, soldat d’élite parmi la crème de la crème de Tsahal,
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 tira. Aussitôt, les gardes nazis répliquèrent en des rafales nourries dont les longs projectiles fuselés blessèrent le chef du commando ainsi que deux de ses compagnons. Cependant, ces tirs au but ne découragèrent pas les Tempsnautes. Eux aussi usaient de leurs armes futuristes qui descendaient un à un les membres de la garde personnelle de Hitler. Les représentants de l’ordre noir se roulaient sur le sol, atrocement brûlés par ces rayons quasiment invisibles, ne comprenant pas comment ils avaient pu se faire abattre.
En une poignée de secondes, le Reichskanzler se retrouva seul face à face à la tueuse, plus déterminée que jamais. Encore quelques éclairs de feu et c’en était définitivement fini du monstre.
Or, fascinés par leur proie, les Israéliens commirent une erreur. Ils ne s’occupaient plus que de Hitler, ignorant ce qui advenait derrière eux. Alertés par Goebbels
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 par un coup de téléphone passé à la caserne centrale de la ville, cinq mille soldats et policiers, surarmés, affluaient vers leur Führer afin de lui porter secours. Tous jaillirent des couloirs et des entrées du stade, se moquant de piétiner un peu plus la foule affolée en train de fuir.
La jeune femme eut le tort de rester figée une seconde. Le regard de nuit d’Adolf l’avait brûlée. Sa main retomba inerte sans qu’elle eût fait feu.
- C’est fichu ! Hurla Abraham en hébreu. Reculons.
Le commando venait de laisser passer sa chance. A nouveau protégé et entouré, Hitler, qui n’avait pas paniqué, put trouver refuge dans sa voiture personnelle et quitter ce lieu maudit.
Cependant, bien assis sur le siège arrière, il laissa enfin éclater sa rage. S’en prenant à Himmler, à ses côtés, il éructa des menaces tout en arrosant abondamment de ses postillons le chef de la SS.
- Je veux savoir qui ils sont. Comment ils ont pu entrer dans le pays. Je veux leur tête. Je veux leur peau. Tous les incapables qui n’ont pas su les arrêter le paieront. Ils seront jugés pour trahison… Heinrich, c’est de ta faute tout cela… tes hommes n’ont pas été à la hauteur. Les services de renseignements non plus…
Pendant cette diatribe, les Israéliens survivants avaient pu atteindre le gymnase dans lequel ils s’étaient barricadés. Enfin, les spectateurs avaient quitté le stade. Sur la chaussée cendrée, des centaines de corps sans vie, plus ou moins en bon état, des chaussures perdues, des chapeaux, des sacs abandonnés, des fanions et des drapeaux, du sang qui commençait à sécher en flaques sombres, des jouets et des poupées aussi.
Tous les membres de Tsahal tenaient les points stratégiques de la vaste salle de gymnastique. S’étant emparés des fusils et de pistolets laissés par leurs ennemis, ils mitraillaient sans pitié tous ceux qui essayaient de pénétrer dans le bâtiment. Les vitres brisées éclaboussaient de verre les tapis et le sol alors que les filets de tennis et les chevaux d’arçon, en mauvais état, répandaient leur bourrage ou leurs cordes dans le plus grand désordre. Du plafond pendouillaient des lampes arrachées par les tirs.
Durant deux heures, les sept survivants, ivres de courage, véritables kamikazes modernes, sachant qu’ils n’avaient plus rien à espérer, ayant juré de mourir sans se rendre, tinrent tête à cinq mille soldats de la mort, des SS et des policiers fanatisés, splendides machines à tuer.
La loi du nombre était la plus forte et les nazis devaient logiquement l’emporter. Malgré leurs armes sophistiquées, leur détermination au-delà de tout éloge, les Israéliens moururent un à un, tombant au champ d’honneur. Ils auraient mérité un péan de la part des aèdes des temps anciens. Ils auraient dû avoir leur nom gravé sur le monument des héros d’Athènes… 
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Les nazis avaient finalement enfoncé les portes après deux heures de rudes combats, en ignorant les pertes effroyables qu’ils subissaient dans leurs rangs. Un seul Israélien résistait encore et toujours, à quelques pas des barres asymétriques. Une femme, les yeux et les cheveux noirs, un sourire cruel sur les lèvres. Cinq assassins firent feu sur elle à bout portant. Criblée de balles, perdant son sang par maintes blessures, elle eut cependant la force de viser et de tirer sur le capitaine SS, l’atteignant en plein front. Une étoile pourpre vint orner la tête de l’officier tandis qu’il tombait à la renverse, les yeux emplis d’étonnement pour l’éternité.
Puis, la jeune femme s’effondra, transpercée par vingt autres balles en criant en anglais :
- Israël vaincra !
Son corps roula sur le dallage et, chose incroyable, devint lumineux. Quel phénomène était-il en train de se produire ? Les militaires aguerris, qui n’avaient peur de rien, reculèrent d’effroi.
Un peu plus d’une heure plus tard, l’officier survivant de la compagnie de SS fit son rapport au Führer dans une des salles de l’Hôtel de Ville dans lequel il avait trouvé refuge. Il n’omit pas de conter ce qui était survenu dans le gymnase.
Adolf examina de près les documents trouvés sur les cadavres des membres du commando, toucha et mania quelques-unes des armes déchargées, étudia les photographies en couleurs visiblement prises sous d’autres latitudes. Himmler, Goebbels et Goering se tenaient à ses côtés, tous incrédules face à ce qu’ils voyaient. Un peu en retrait, d’autres dignitaires nazis étaient tout aussi secoués. Hess, Speer
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 et Bormann devisaient entre eux à voix basse. Ils se turent lorsque le Führer prit la parole.
- Aber… Das ist unmöglich ! Sehen Sie das foto…
Le chef des services secrets, impavide, se permit une remarque.
- Mein Führer, je vous jure que ces photos ne sont pas truquées. Il s’agit bien de la ville de Jérusalem, mais une Jérusalem inconnue, aux bâtiments modernes, neufs… regardez cet immeuble officiel. 
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- Comment pouvez-vous en être aussi certain ? Proféra Himmler en plissant ses yeux derrière ses lunettes rondes.
- Il est surmonté d’un drapeau. Or, cet étendard porte l’étoile de David. 
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Au dos d’un de ces étranges clichés, il y avait une date inscrite dans deux calendriers à la fois. L’une laissa ébahis tous les dignitaires.
- 1992…
- Nein ! Ruhe ! Cessez de piailler comme des bonnes femmes affolées ! Rugit le Führer. Cet incident devra rester secret. Les journalistes ?
- Arrêtés et enfermés dans des cellules, renseigna Goebbels.
- Sehr gut. S’il y a une fuite, le responsable sera immédiatement passé par les armes. Compris ?
- Jawohl, mein Führer !  Firent en chœur les amis et complices d’Adolf.
- Quant aux témoins survivants de cet événement, ils seront tous déportés et internés à Dachau. Si vous osez faire ne serait-ce qu’une allusion à ce qui s’est produit, Heinrich, vous y passerez également quelques temps.
- Mon Führer, je saurai me taire.
- Je l’espère bien. Tous vos hommes ont été incapables d’empêcher ce massacre… Vous mériteriez d’être exécutés, vous tous…
Mais le chef des services secrets se permit une remarque.
- Il nous faudrait étudier ces armes de plus près. Apparemment, elles proviennent du futur. Nos ingénieurs militaires seraient plus qu’intéressés par leur examen. Notre Etat devrait en tirer parti…
Mais il n’en fut rien pour la bonne raison que le Commandeur Suprême remit de l’ordre après cette tentative de bouleverser le cours de l’Histoire du XXe siècle. Moins de vingt-quatre heures plus tard, documents, armes et uniformes anachroniques s’évaporèrent comme s’ils n’avaient jamais existé, ou du moins, comme s’ils n’étaient jamais parvenus en 1934. Rien ne s’était produit, le continuum spatio-temporel fut reprisé avec le plus grand soin. Aucun des protagonistes, directs ou indirects, ne conserva le souvenir des sanglants événements de ce 5 septembre 1934.
Toutefois, en 1993, le Président Drangston et le Premier Ministre israélien garderont dans leur mémoire le départ du commando pour l’Allemagne nazie. Mais voilà, comme ils ne recevront aucune nouvelle, comme rien n’aura changé, ils penseront que ledit commando aura lamentablement échoué dans son expédition, qu’il aura péri durant le transfert…
L’amorce de l’harmonique temporelle nouvelle, de la chronoligne bis, grâce aux efforts de l’Entité artificielle, avait rejoint sa place au sein d’une Supra Réalité non appréhendable par les contemporains du professeur Stephen Möll, celle d’une simple potentialité jamais réalisée. Le chercheur américain n’avait, de toute façon, rien su de ce qui se tramait derrière les coulisses. Quant à Michaël Xidrù, il avait ressenti le départ d’un changement mais il ne s’en inquiéta pas pour autant. Comme il poursuivait sa mission, il fut soulagé de voir que son supérieur immédiat avait pu parer les effets négatifs du bouleversement temporel. C’était là l’essentiel, non ?

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