dimanche 13 février 2011

Mexafrica 3e partie : Le chevalier au blanc harnois chapitre 24.

Chapitre 24

Maintenant seul, Sydney Greenstreet,

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ou plus exactement le clone du Commandeur Suprême, observait avec une délectation évidente un Arnould de Charmeleu hirsute, baignant dans une fange nauséabonde, vêtu encore de son haubert dont les mailles ternies et rouillées adhéraient désormais à même la peau, la chemise le couvrant autrefois ayant disparu. Oubliant la lourde grille du sinistre cul-de-basse-fosse, la sphère noire anthropomorphisée pénétra jusqu’à sa proie et lui expliqua froidement pourquoi elle allait l’éliminer.

- Pitoyable créature humaine, si dérisoire et si orgueilleuse à la fois! On ne fait pas appel à la Destruction en vain! Lorsqu’on s’inspire du Malin, lorsqu’on s’en réclame, on a tendance à oublier que le Mal absolu signifie la Destruction totale! Or, vois-tu, j’ai été conçue pour cette tâche justement, et, parce que toi, Charmeleu, tu as voué ton existence entière à ce Mal, il est logique que tu finisses ta vie dans la souffrance! Pendant que tu meurs à petit feu, que tu t’estompes dans le Néant, j’accumule toutes les informations que toi, modeste et ridicule unité carbone, tu t’es ingéniée à collecter pour mon plus grand profit.

Relevant alors la tête, une dernière lueur de défi dans le regard, Arnould cracha au visage de son tourmenteur et bourreau:

- Puisque vous êtes, messire Satan, un parfait hédoniste, j’accepte mon sort! Mon âme était perdue depuis longtemps, certes, je l’avoue, mais j’ai bien vécu. Rien ne m’a manqué. J’ai connu richesse, triomphe et puissance!

- Moui… Tout cela passe, trépasse, éphémère et fugace! Il n’y a point d’enfer, humain limité, seulement une grande unification au point zéro du Pantransmultivers de tous les possibles, là où toutes les potentialités se confondent! Es-tu déçu?

- Pourquoi le serai-je?

- Tu vas sombrer dans le Néant! Il ne restera rien de toi! Tu n’auras même plus conscience d’avoir été un si bref instant!

- Peu me chaut! Je ne souffrirai plus!

- Ah! Ma mission, dès le commencement du Tout a consisté à saboter la Vie! Aucun Univers possible ne doit voir le jour! J’aspire au Néant éternel! À l’Infinité du Rien! Cependant, pour connaître ce que chacun peu donner, je laisse un peu de temps à ces mondes… or, que signifie le Temps pour moi? Une illusion, un leurre! Ainsi, se pensant libres, leurs brides lâchées, ces potentialités poursuivent cahin-caha leur petit bonhomme de chemin. Mais lorsque j’ai collationné assez de renseignements, je les détruis! Avec la satisfaction du devoir accompli! Souviens-toi Arnould, avant de passer outre, de cette Unique Vérité: pour détruire le monde, pour l’effacer, pour annihiler le Pantransmultivers, pour l’empêcher d’être tout simplement, la Mort, plus exactement l’Entropie doit savoir ce qu’il y a eu ou ce qui pourrait être! Détruire sans connaître ne sert à rien! Alors, il me faut enregistrer, encore enregistrer, toujours enregistrer. Tel est mon lot, telle est ma Mission. Jusqu’à ce que je demeure Seule!

Ainsi s’acheva la réponse de la sphère noire qui disparut subitement dans un flash violet pour se rendre instantanément dans l’Empire de Texcoco afin d’aider et de surveiller tout à la fois Pavel Pavlovitch. Lorsque l’Entité atterrit à l’endroit prévu, elle se rematérialisa sous l’apparence anodine de Sydney Greenstreet.

Pendant ce temps, Charmeleu voyait filer ses ultimes instants. Son espace vital se mit à rétrécir inexplicablement. L’eau croupie dans laquelle il pataugeait depuis de trop longs jours remontait tandis que la muraille, rongée, sapée par les infiltrations du Nil, tremblait et s’ébranlait.

Mais il y avait pis! La sphère ne pouvait se contenter de cette fin des plus classiques. Des alter egos déphasés du baron, tout aussi pouilleux que lui, on reconnaissait bien là l’humour douteux du Commandeur Suprême, lui disputaient la place plus que réduite ainsi que les bouffées de plus en plus rares d’un air méphitique. En quelques secondes, ce furent des dizaines d’Arnould en loques qui s’entassèrent dans ces quelques mètres cubes, revivant par anticipation le supplice de la terrible chambre noire imaginé par un shah de Perse du XVIIIe siècle!

Puis, note macabre, s’ajoutèrent deux crocodiles sacrés du Nil, d’une taille des plus imposantes, entrés avec les eaux du fleuve par la brèche qui s’élargissait. Les sauriens se disputèrent frénétiquement leur proie. Ainsi périt Charmeleu à moitié dévoré, à moitié noyé! Enfin, rassasiés, les crocodiles moururent aussi, écrasés par les moellons du cul-de-basse-fosse en train de s’effondrer.

Pourtant…. Bientôt tout reprit un aspect habituel à l’ultime picoseconde! L’illusion du Commandeur Suprême cessa de fonctionner. Toutefois, il ne restait bien d’Arnould qu’un cadavre livide, au rictus horrible, aux yeux éteints fixant le vide pour l’éternité. En fait, le Grand Maître de la Buena Muerte avait succombé à une crise cardiaque provoquée par une peur intense.

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Par un de ses tours dont il était familier, le clone de l’Entité avait transporté le petit groupe de Daniel Wu à l’intérieur d’une nécropole souterraine labyrinthique dont il fallait rapidement découvrir l’issue sous peine de mort. Naturellement, Ufo n’avait pas été oublié. Une fois encore, Fermat laissa éclater son exaspération.

- Fichu type! Cet histrion a décidé de nous faire revivre les épreuves enregistrées et emmagasinées dans notre mémoire multiple! Les galeries des termitoïdes ou bien encore le temple mandala créé par Johann!

- Pardonnez-moi, messieurs, mais je ne saisis pas! Fit Stankin doucement. Vous avez déjà rencontré, jadis, cet être nuisible, je constate…

- En quelque sorte, lui répondit Daniel. Ailleurs, dans d’autres chrono lignes.

- Mmm. Vous avez omis de vous présenter… à part le fait évident que vous êtes des Terriens provenant d’un futur plus technicien que mon époque véritable, que l’un d’entre vous manifestement n’appartient pas à cette dimension ou à cette réalité-ci, que vous, Fermat, qui parlez et exprimez abondamment votre frustration, êtes d’origine française et certainement un ancien militaire ou soldat, j’ignore tout de vous ou presque! Ah! J’oubliais! Daniel dispose d’une force prodigieuse, surhumaine… sans doute la nanotechnologie a-t-elle à voir dans cette capacité…

- Stankin, vous faites un remarquable observateur! Rit le commandant Wu. Puisqu’il faut se montrer poli… voici le sire chevalier Philippe, bras armé de la Justice et du Bien dans ce XIIIe siècle merveilleux. André Fermat, ancien commandant dans la flotte des 1045 planètes, ambassadeur de l’Alliance habituellement et moi-même, Daniel Lin Wu, effectivement le seul daryl androïde existant dans ladite Alliance, du moins à ma connaissance, depuis le traité de Mowelle de 2354.

- Enchanté.

- Au fait, nous venons de l’an 2517, mandatés par l’amiral Trabinor. Dans notre monde, la Galaxie est sens dessus dessous… et subit une guerre…

- Trabinor… j’ai fréquenté un Trabinor à l’Académie des Sciences, il y a près de quatre-vingt ans… par rapport à l’an 2192 de l’ère chrétienne.

- C’est l’arrière-petit-fils qui commande la Flotte de l’Alliance.

- Dites, messieurs, laissons-là les mondanités et préoccupons-nous de trouver la sortie de ce maudit piège! S’impatienta l’ambassadeur.

- Vous avez tout à fait raison André. Ce Commandeur Suprême est une sangsue mâtinée de cobra particulièrement tenace, de la pire espèce.

- Hélas! Je pense que nous ne parviendrons à nous en défaire qu’en niant son existence! Soupira l’Hellados.

- Nier la Mort? Pourquoi pas? Cela me tente… mais il nous faudra une force d’esprit immense… En nous mettant en transe, en usant de l’enseignement du Bouddha, nous devons pouvoir…

- Oh! Si vous le souhaitez vraiment… proféra Stankin. Il suffit de se replonger dans l’innocence de l’enfance… et de conserver l’équanimité, une équanimité toute helladienne acquise après bien des décennies d’études. Êtes-vous entraînés à cela, mes libérateurs?

- Je renonce! Jeta André après quelques minutes. Je suis incapable d’un tel exploit mental! Tâchons plutôt de sortir d’ici classiquement.

- Bien. Mais qui porte d’Ibertin maintenant totalement aphasique?

- Moi! Sourit Philippe. Il ne pèse rien et c’est en partie à cause de moi que nous nous retrouvons présentement prisonniers dans cette nécropole. De plus, je vois dans l’obscurité comme sous le soleil. Tout comme vous, Daniel.

- Vous aviez remarqué. Donc, vous savez que nous sommes enfermés à l’intérieur d’une immense nécropole, sans doute sise dans les environs du Caire, si j’en crois l’observation géologique du sol, un tombeau contenant des momies sacrées d’animaux tous sacrifiés, des taureaux apis, des béliers, des chats, des crocodiles, des ibis, des babouins et j’en passe.

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Ufo, nullement effrayé par l’atmosphère morbide et confinée du lieu, tournait autour des momies qui achevaient de pourrir là depuis des dizaines de siècles. Peut-être escomptait-il se nourrir de ces chairs poudreuses vu que son estomac gargouillait bruyamment!

- Pouvez-vous vraiment nous sortir de cette tombe avec vos dons de nyctalopes? Fit André très sceptique.

- Sans doute. La salle dans laquelle nous nous trouvons actuellement est entièrement consacrée aux oiseaux comme en témoignent les milliers de jarres entassées jusqu’au plafond. Renseigna Daniel sur un ton détaché.

- Mmm. Marmonna l’ambassadeur de plus en plus méfiant, reconnaissant l’attitude nonchalante prise par le daryl androïde pour chasser l’inquiétude.

- Et cette odeur méphitique? Rajouta Stankin. Respirer de tels relents ne comporte-t-il pas un danger pour notre santé?

- Mais nous disposons d’un mini respirateur! S’exclama Daniel. Tenez, Stankin.

Après le branchement de l’appareil, le daryl reprit sur un ton autoritaire:

- Ufo, ici! Ces débris putréfiés sont absolument immangeables, crois-moi!

Sous la punition mentale de son maître, le chat, penaud, s’en revint, la queue basse, près de Daniel. Toutefois, fort excité, il se mit à tourner sur lui-même, flairant de ci, de là, ressentant la proximité de ses congénères momifiés.

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Ce ne fut pas sans difficulté que fut appliqué l’appareil respiratoire sur le nez de d’Ibertin. Puis, cette tâche achevée, l’Hellados s’abaissa, brisa une jarre et fabriqua des torches afin de faciliter la progression de tous dans ce labyrinthe. Toutefois, le nouvel éclairage dégageait une senteur particulièrement âcre qui provoquait une toux sèche, car c’étaient des momies d’ibis toutes raidies dans un bitume multiséculaire qui brûlaient ainsi.

Ufo mit à profit la courte distraction de son maître pour filer comme une flèche. Naturellement, le félin ne cherchait pas qu’une hypothétique pitance! Il voulait trouver une issue, s’étant rendu compte qu’en ces sombres lieux, si nauséabonds, il n’y avait aucune nourriture goûteuse!

- Ah! Cet Ufo! Suivons donc mon animal familier! S’exclama Daniel. Faisons confiance à son instinct. Ses miaulements sont clairs.

Ainsi firent donc les quatre hommes évitant les pièges variés s’offrant à eux, c’est-à-dire fosses hérissées de pointes, pierres basculantes aux instants les plus inadéquats, culs de sac innombrables et bien d’autres encore. Les corridors s’enchaînaient et aux flammes vacillantes des torches, nos explorateurs malgré eux reconnaissaient des ossements entremêlés où adhéraient encore des restes de chair racornie, tout cela au milieu de débris de jarres, de tessons plus ou moins souillés par d’antiques liquides. Les momies étaient des babouins, des crocodiles ou des bovins.

André dut se frayer son chemin en manifestant son dégoût car parmi toutes ces dépouilles, il identifia plusieurs avortons ou cadavres d’origine humaine, des anencéphales considérés comme des cynocéphales sacrés. Parfois, même, des bras décharnés d’hamadryas s’agrippaient aux jambes des intrus comme dotés de vie. Nullement incommodé au contraire du Français, Stankin repoussait ces dépouilles alors que Fermat, avec une grimace explicite les faisaient tomber en poussière d’un coup de pied.

Mais les miaulements d’Ufo se rapprochaient, devenant plus distincts. Accélérant le pas malgré les obstacles, le groupe rejoignit enfin le félin qui courait d’une urne à l’autre, bondissait sur les jarres, se frottait contre elles pour revenir ensuite vers le tunnel dans un état de surexcitation incroyable! Pourquoi donc tant d’agitation? En fait, c’était là que les chats sacrés avaient trouvé leur dernière demeure!

Or, le plafond diffusait de la lumière. Manifestement, la présence d’un puits y était pour beaucoup. La clarté lunaire parut plus éclatante que mille soleils à nos enterrés vivants. Ils avaient hâte de quitter cette nécropole empuantie par les innombrables momies décomposées.

André et Daniel qui semblaient avoir tout prévu, déroulèrent des filins qu’ils accrochèrent à la bordure du puits et tous s’apprêtaient à l’ascension lorsque Jacques d’Ibertin fut soudain pris d’un délire furieux. Peut-être était-ce la faute aux émanations méphitiques de la salle?

Le moine chevalier était persuadé que la galerie renfermait un trésor constitué de poudre d’or, de pierreries, d’ambre et d’armes serties de joyaux. Il croyait également que les chats momifiés en étaient les gardiens intraitables.

Doté d’une force venue on ne sait d’où, avec une rage incontrôlable, il se mit à briser lesdites momies en lesquelles il voyait des créatures démoniaques s’agiter et l’attaquer. À ses oreilles, les miaulements d’Ufo se transformaient en appels stridents à la vengeance. Pour lui, le chat poussait ses frères à l’assaut contre le voleur, le profanateur qu’il fallait tuer!

L’illusion atteignit un degré tel qu’elle parut devenir collective! Les hordes momifiées de félins profanés se redressèrent malgré les bandelettes moisies qui les entouraient, des griffes acérées déchirèrent les tissus, puis les corps souples et décharnés bondirent à la curée en direction du chevalier sacrilège.

Or, au lieu de reculer sous l’attaque, d’Ibertin poursuivait sa folle et vaine destruction. Stankin tenta bien d’empoigner les bras du moine soldat mais ce dernier fut brutalement englouti par les milliers et milliers de dépouilles sacrées. Après le dernier souffle de d’Ibertin, les illusions se dissipèrent et regagnèrent les limbes tandis que la salle retrouvait son aspect originel.

N’ayant pas d’autre choix que d’abandonner là le corps de Jacques d’Ibertin, le quatuor entama l’ascension et, une fois à l’air libre, fit le point et s’orienta. C’était là une tâche assez facile pour qui connaissait la position des étoiles. À la lisière du désert, la nécropole était distante de cinq lieues du camp où Irina, Geoffroy et ses amis, sans oublier Violetta et Uruhu avaient trouvé refuge. Avant d’emprunter la direction du nord, Stankin prononça l’épitaphe de Jacques seigneur d’Ibertin d’une voix dépourvue d’émotion.

- Les humains ont bien du mal à contrôler le tumulte de leurs sentiments. Ainsi, trop souventes fois, ils poursuivent des chimères qui les terrassent. Tel a été le funeste sort de d’Ibertin. Qu’il connaisse enfin la paix!

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Après de chaudes retrouvailles, l’Hellados fut présenté dans les règles au capitaine Maïakovska, au chef pilote Uruhu ainsi qu’au trio d’adolescents. À la vue du K’Tou, Stankin leva un sourcil de surprise mais se reprit immédiatement. Sondant discrètement le Néandertalien, il sut pourquoi le commandant Wu l’avait sélectionné pour piloter son vaisseau.

Quant à Violetta, elle s’inclina cérémonieusement devant le scientifique, respectant le complexe protocole helladien à la lettre, mais comme si elle avait affaire au Président de la planète en chair et en os!

- Mademoiselle, fit Stankin en partie amusé, ma modeste personne ne mérite point tant d’honneur!

- Votre Grandeur, permettez-moi de ne point être de votre avis! Vous avez devant vous une de vos plus ferventes et sincères admiratrices, répliqua l’adolescente avec aplomb dans la langue maternelle du chercheur, langue qu’elle maîtrisait à la perfection bien qu’elle comprît des intonations musicales particulièrement difficiles pour des palais non Helladoï. De plus, vous êtes l’inspirateur et le maître à penser de Sarton, celui qui permit notre existence à tous! On enseigne vos théories à l’Académie de la Flotte et vos succès à l’école préparatoire permettant de passer le concours d’accès aux classes de diplomatie.

- Et vous y êtes une des meilleures élèves…

- Restons modeste!

De plus en plus amusé, Stankin évita cependant de sourire et préférant prendre Ufo dans ses bras, se mit à le caresser. Il s’était lié d’amitié avec le chat et celui-ci, pourtant capricieux et difficile à approcher généralement, se laissait faire et ronronnait d’aise.

Toute cette assemblée partagea ensemble une dernière collation. Il était temps de rejoindre enfin la Mexafrica. En effet, Daniel venait de capter un message mental d’Antor l’informant qu’il avait réussi à localiser précisément les Soviétiques. Mais Zoël Amsq n’était pas loin non plus!

- Et Kiku U Tu? S’inquiéta le daryl androïde.

- Ni vu ni senti! Avait répondu le vampire avec une mimique indéfinissable. Vous avez délivré Stankin, tant mieux! Au moins cela d’obtenu!

- Exactement. Il nous expliquera en détails en quoi consistent les deux pièces manquantes de son bio translateur.

- A propos, Daniel… j’ai appris qu’un des éléments était dissimulé dans la salle du trésor de Nanki Bembé Coatl!

- Bigre! Bravo! Mais comment es-tu parvenu à cette conclusion?

- En lisant dans les esprits des hauts dignitaires du Moro Naba, tout simplement mon frère!

- Il n’y a pas à dire! Sans toi je ne suis pas aussi efficace que Venge et Trabinor le croient!

- Ne va pas jusqu’à m’appeler « Père Joseph »!

Sur cette pointe, Antor interrompit brutalement le lien télépathique.

Le témoin de rappel permit à la navette Einstein, totalement fonctionnelle et efficiente, ce n’était pas trop tôt, de se rematérialiser. Puis, Daniel, André et l’Hellados, qui malgré son léger retard technique pouvait les épauler - après tout ne s’agissait-il pas d’un génie que le traité de Mowelle non encore signé n’entravait pas - s’attelèrent à la vérification des moteurs et de l’IA.

Cette tâche fort délicate ne prit pourtant que deux heures. Depuis que Zoël avait quitté cette chrono ligne et surtout depuis la mort de Charmeleu, le merveilleux et le fantastique s’estompaient à vitesse grand V. Seul restait le chevalier Philippe qui avait une importante mission à terminer.

Vinrent donc les adieux. Philippe serra fraternellement Daniel Wu contre sa poitrine, lui donnant l’accolade et lui dit:

- Messire Daniel je prierai pour la réussite de vos desseins et entreprises. Que Dieu vous ait, vous, votre femme, et tous vos amis en Sa sainte Garde! Ne vous en faites pas pour messire Kiku, votre lézard parlant! Il est sauf. Il y a peu, il est parvenu à s’échapper des mains des créatures malintentionnées qui l’avaient capturé.

- Mmm. Être un ange, même incarné a ses avantages! Soupira Irina.

- Capitaine Maïakovska! S’étrangla André.

- Et alors, pourquoi tant d’émoi? Ce n’est pas la vérité peut-être?

- Chevalier, reprit Daniel, que comptez-vous faire?

- Veiller tout d’abord à ce que notre Sire le roi Louis ait sa rançon versée. Que sa captivité ne soit point trop dure et qu’il sorte de cette épreuve sanctifié. Dieu y pourvoira. Je reste dans ces terres dans l’attente de sa délivrance prochaine.

- Que vous souhaiter? Proféra le daryl androïde. La protection du Bouddha? Je n’ose…

Alors, soudainement, Irina s’agenouilla demandant pour elle-même et Tatiana la bénédiction.

- Dame Irina, fit Philippe confus. Je ne puis…

- Les prêtres qui ne sont que des hommes le peuvent… en tant qu’envoyé de Dieu…

- J’expie un grave péché!

- Qui ne vous empêche pas toutefois de venir à bout des hordes du démon! Lança Geoffroy.

- Autrefois, ailleurs, j’ai sauvé Nicole Agathe des griffes d’Ogo et…

- Et vous en êtes tombé amoureux!

- Je dois aimer les humains comme des frères et non…

- Ne tergiversez pas tant! Dieu est Miséricorde et Pardon!

- Soit!

Philippe se rendit à l’insistance d’Irina et bénit la jeune femme et son enfant. Après cela, le chevalier quitta la navette qui, quelques secondes plus tard, décolla pour disparaître de cette réalité-ci. Désormais, le petit vaisseau courageux devait franchir les différents et multiples cercles spiralés de déviation jusqu’à rejoindre son objectif: l’an 2148 de l’Univers 1790 dans l’Empire de Texcoco!

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L’Égypte n’en avait pas terminé avec ses aléas politiques. Turan Shah, dernier des sultans Ayyubides, c’est-à-dire appartenant à la maison de Saladin, fut déposé et supplicié par le nouvel homme fort du pays, Baïbar. Celui-ci instaura alors la dynastie des mameluks.

Un guerrier cruel vint apporter à Louis IX, toujours prisonnier dans son cachot, le cœur du sultan torturé et mis à mort. Nouvelle épreuve pour le futur saint.

À la suite d’âpres négociations, Louis signa une convention prévoyant la capitulation de Damiette. Cependant, la rançon, énorme pour l’époque, de 400 000 livres fut versée et le souverain fut enfin libéré le 6 mai 1250.

Les Croisés rejoignirent donc la Terre Sainte où ils s’y établirent jusqu’en avril 1254. Tout d’abord, le roi s’installa à Saint Jean d’Acre et ce, dès la mi-mai 1250. Au mois de mars 1251, il changea de résidence, passant à Nazareth, Césarée, Jaffa et d’autres villes encore. Or, Philippe se tenait toujours à ses côtés.

Le départ de Daniel Lin avait définitivement mis un terme à ce XIIIe siècle dévié. De leur côté, TQT et la NSA avaient également fui ce monde et rejoint Texcoco grâce à l’aide des p et à leurs translateurs construits en série.

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